Il s’appelle Alexandre Denis. Curé à Paris le jour – il officie à Saint Pierre de Montmartre -, il est magicien le soir venu. Son nom de scène : Père Alex. Le titre de son spectacle : Entourloupe(s). Car son truc, c’est la triche aux cartes. Illusionniste, il a même obtenu le Molière de la Création visuelle, en 2019. Pour le voir, rendez-vous chaque samedi à 21 heures dans la salle de spectacle du restaurant Factorielle 52, « lieu de vie magique », comme le définit le prestidigitateur Mael Adler, directeur artistique de cette nouvelle adresse du XIIIe arrondissement, entre quais de Seine et Bibliothèque François Mitterrand. « Ils sont nombreux, dans le milieu de l'illusion, à avoir une double vie... professionnelle », constate Arnaud Dalaine, directeur de la Maison de la Magie à Blois. C’est le premier prestidigitateur à chapeauter ce Musée de France, créé à l’orée des années 1990 sous l’impulsion de Jack Lang, alors maire de la ville. Installé dans une bâtisse du milieu du XIXe, face au Château royal et juste au-dessus de la Loire, ce musée de 2 000 m2 rend hommage, sur un étage entier, à Jean-Eugène Robert-Houdin, blésois d’origine et célèbre illusionniste du XIXe, vêtu à la Mandrake avec queue de pie et haut-de-forme. Signes particuliers : ses assistants étaient, bien souvent, ses enfants et c'est le réalisateur - et illusionniste - Georges Méliès qui va lui racheter son théâtre parisien en 1888... Quant au reste des espaces de la maison-musée de Blois, ils mêlent objets, affiches, sarcophage et momie, coffre dans lequel on a coupé en deux Isabelle Adjani ou autres mises en scène qui content et racontent la magie d’hier jusqu’à celle d’aujourd’hui. De la sorcellerie typique de l’Antiquité jusqu’aux lévitations de David Copperfield, en passant par le génial Charles Joseph Carter ou encore Harry Houdini, le roi de l’évasion, interprété sur grand écran par Tony Curtis. C’était en 1953.

Apparitions, disparitions et femme la plus petite du monde…

Et les tours dans tout ça ? « À la Maison de la Magie, nous en proposons plusieurs fois par jour », répond Arnaud Dalaine. Au « Grenier magique », tout d’abord. À raison d’illusions, fantaisies, apparitions, disparitions ou autres prestations de bateleur, voire d'escamoteur, d’une quinzaine de minutes chacune, programmées à plusieurs reprises dans la journée. Avant de créer Factorielle 52, Mael Adler a fait partie de la liste des artistes à l'affiche du « grenier »... Puis, direction le Grand Théâtre, bâti sous la place du Château royal blésois. Cette salle de 300 places propose 3 à 4 représentations par jour, chacune de 30 minutes, où l’on croise la femme la plus petite du monde, une lanceuse de couteaux, un drôle de vagabond, une diseuse de bonne aventure en lévitation… soit toute une déclinaison de numéros et entre-sorts inspirés de « la magie foraine », thème retenu cette année par Arnaud Dalaine. Car les spectacles changent, se renouvellent, pour que le musée reste attractif au fil des saisons. À cela s’ajoute la première édition d’un Festival de close-up – ou « magie de proximité » - prévue du 28 au 30 novembre 2025, à Blois.

Tours et détours

 « C’est un coffret de prestidigitation, offert à Noël, qui m’a donné envie de devenir magicien. J’avais 10 ans… », se souvient Arnaud Dalaine, qui a ensuite appris la magie dans des tonnes de livres. Même scénario pour Alexandre Denis, qui a eu le déclic pour l’illusion en observant les tours et détours de son enseignant en classe de CM1, à Châteauroux. Père Alex qui, à son tour, aujourd'hui, transmet son savoir. « Il m'a formé », confie Mael Adler, adepte du close-up. D’ailleurs, chaque soir, aux tables de Factorielle 52, c’est un peu la « nuit magique ». Des prestidigitateurs passent et repassent pour jouer, leurrer, duper avec des cartes, au plus près des clients. Réel ou irréel ? « Telle est la question », répond Arnaud Dalaine, dont les mises en scène et scénographies, à Blois, oscillent sans cesse entre les deux univers. Un exemple ? D’un côté, une illusion d’optique donne l’impression de servir la tête d’un visiteur sur un plateau. De l’autre, l’émergence d’automates en forme de dragons, chaque demi-heure, des portes et fenêtres de la Maison de la Magie, rappelle la salamandre, emblème de François 1er, dont la résidence principale était le château de Blois... Fiction et réalité s’emmêlent pour une petite leçon de grand bluff. « Y’a un truc », aurait dit le magique Majax. À en croire les faiseurs de grande illusion, rencontrés pour cette chronique, oui, « il y en a toujours un ».

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Musée de la Magie Robert-Houdin : 1 place du Château, 4100 Blois – Tél : 02 54 90 33 33 – Et aussi ICI

Factorielle 52 : 70 rue du Chevaleret, Paris 13e – Tél : 01 73 74 44 79 – Et aussi ICI