Ils font partie de ceux qui arrêtent leur voiture au bord de la route, parce qu’un sous-bois, un bosquet, un ruisseau… mérite le détour. Comme ça, sans rien prévoir. Célina Blundell et Christophe Therrien prennent le temps de sentir une terre humide après la pluie, marcher dans les feuilles, observer une fleur, un arbre, un oiseau… Ce sont des curieux, des sensibles, des fouineurs, des flâneurs. Tous les deux artistes peintres, ils œuvrent et vivent ensemble. Signe particulier : si on leur confie les murs d’une pièce, d’un appartement d’une maison, d’un château… ils vont les parer de dessins. Et même du sol jusqu’au plafond, s’ils ont cette marge de manœuvre. Duo au trait doué, aussi bien dans le figuratif que dans des réalisations plus abstraites, c’est le lieu où ils créent qui les guide, les inspire, les anime. Il faut les laisser faire. Célina Blundell et Christophe Therrien ne s’épanouissent qu’en liberté. Avec des influences multiples, issues des grotesques italiens, du XVIIIe siècle français, des Nabies ou de l’Art déco. Bluffé par deux de leurs originaux présentés au salon Révélations, en 2023 à Paris, Jean-Etienne Bélicard, à la tête de la maison de papiers peints Isidore Leroy, les a approchés, puis leur a commandé une collection. Un exercice nouveau pour le duo. Habitués aux surfaces XXL, Célina Blundell et Christophe Therrien ont accepté le challenge du lé. Un travail qui permet désormais à un plus grand public d’accéder à leur univers.

Célina Blundell et Christophe Therrien, vus par Ava du Parc.

Nature vivante

Passiflores, Pétrichor, Arundo Donax… les noms des papiers peints pensés pour Isidore Leroy évoquent la nature. Une nature vivante, comme cette terre mouillée qui a donné vie à Pétrichor, ou ces cannes de Provence courbées par le souffle du mistral, qui ont inspiré le décor végétal d’Arundo Donax. Le trait est juste, précis, exquis. Comme sur un tableau. « Sur chaque papier peint, on sent le gras, le maigre, le chaud, le froid, la peinture liquide ou l’effet d’empâtement », souligne Célina Blundell. L’idée : rester au plus près des dessins d’origine, grâce à de savants calages. À commencer par le choix des tonalités. Et ce d’autant que certains papiers peints se déclinent en plusieurs coloris. À cela s’ajoute la possibilité de déployer un décor sur 15 mètres de long, sans se répéter. De nouveaux défis pour Célina Blundell et Christophe Therrien, plutôt sollicités pour peindre sur les murs des salons privés de grandes maisons de Champagne, ceux des restaurants étoilés ou encore ceux du Château La Gordonne, en Provence.

Deux parcours singuliers

© Ava du Parc / pour Isidore Leroy

Ils ont dessiné avant de savoir écrire. Célina Blundell esquissait des silhouettes de sirènes sur les cahiers de ses camarades de… maternelle. Même facilité avec le crayon pour Christophe Therrien, dès son plus jeune âge. À cela s’ajoute un contexte familial propice à la création pour elle, avec des oncles et tantes sculpteur et décorateurs de théâtre, qu’elle suivait de près. Quant à lui, la « vraie forme », comme il dit, il l’a apprise d’après modèles, dans la nature et les musées. Des débuts d’autodidacte qui vont lui ouvrir les portes de l’École supérieure des arts appliqués Duperré, des Beaux-Arts de Paris, puis des ateliers de Simonini. Célina Blundell, pour sa part, a enchaîné un bac littéraire-arts plastiques, avec une formation à la peinture figurative et à la gravure aux Ateliers de la Glacière, avant d’intégrer d’autres structures dédiées à la création et la restauration de décors peints. Le tout nourri par un goût des voyages. Et pour cause : « Tous les cinq ans, mes parents s’octroyaient une année sabbatique. Nous avons ainsi quitté Paris pour partir vivre à Moorea, aux Seychelles, à Pondichéry, Londres ou encore Bruxelles. »

Entre Paris et Bordeaux…

C’est à l’Atelier de Ricou que leurs routes vont se croiser. Célina Blundell poursuit alors sa formation. Christophe Therrien réalise déjà des décors pour l’opéra Garnier et le cinéma. Coup de foudre. Puis, coup de maître : le duo ouvre son propre atelier en 2013. Depuis, Blundell & Therrien multiplie les chantiers, avec un quotidien partagé entre Paris, pour les rendez-vous, et Bordeaux, pour le calme, le silence et l’accès à une ancienne manufacture de tabac où ils peuvent concevoir des œuvres monumentales de 30 mètres sur 15… Pour 2025, les projets ne manquent pas. Avec notamment de nouvelles créations pour Isidore Leroy, des décors peints pour un appartement situé place des Vosges et d’autres encore pour la salle de bains voûtée d’un particulier domicilié à Los Angeles… À cela s’ajoute l’envie de développer les interventions dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration. Et ce d’autant que le savoir-faire de Blundell & Therrien s’étend aux dorures, laques, moulures… Pour la boutique Cartier de Bruxelles, imaginée par le studio d’architecture d’intérieur Friedmann & Versace, ils ont même réalisé un bas-relief en papier mâché – à partir d’une technique ancestrale, utilisée par l’architecte catalan Antoni Gaudí -, pour mettre en scène une panthère dans un environnement inspiré des Serres Royales de Laeken. Le sens du détail. La pertinence des références. L’esprit d’une méthode. Blundell & Therrien ne laissent rien au hasard, sans pour autant se prendre au sérieux. Quand on leur demande ce qu’ils font dans la vie, elle répond : « Je suis artiste peintre. » Il complète : « Je fais de la peinture… » 

Blundell & Therrien sont aussi ICI

Et pour Isidore Leroy, c'est plutôt par ...

© Ava du Parc / pour Isidore Leroy