Il s’appelle Alexis Boyer. À 26 ans, il a déjà vu du pays. Beaucoup de pays. Et pour cause : une fois son bac « arts appliqués » en poche, il a bouclé un tour d’Europe à vélo, participé à l’ouverture d’un concept-store à Bruxelles, avant de rallier Ouarzazate… à pied. Aventurier, curieux de tout, mais surtout amateur de fleurs, il a distribué, tout au long de sa route, des graines de coquelicot, sa plante préférée, car « sauvage, fragile et rustique à la fois ». L’idée : laisser quelque chose de son passage, « éphémère comme une fleur », à celles et ceux qu’il a croisés, rencontrés, celles et ceux qui l’ont abrité, hébergé, celles et ceux avec lesquels il a partagé un repas. La suite : un CAP de jardinier paysagiste à Orléans, doublé d’un BTS « gestion et protection de la nature » dans un lycée agricole en Guyane.
Coquelicots géants
De retour en France, Alexis Boyer a bouclé un cursus consacré au marché de l’art, avant de fonder sa société, baptisée La fleur monumentale. « Créateur de fleurs », comme il aime se définir, il conçoit et réalise des variétés XXL dans le cadre de paysages, espaces publics ou autres performances artistiques. En mai 2024, il envoie un message à Constance et Charles-Antoine de Vibraye, les propriétaires du château de Cheverny, pour leur proposer d’installer des coquelicots géants dans les jardins du domaine. La marquise dit banco. L’artiste soumet trois propositions. L’une d’elles est retenue. Mais pour que les coquelicots soient prêts début juillet, Alexis Boyer n’a eu qu’un mois pour donner vie à une cinquantaine de fleurs, dont les plus hautes atteignent les 6 mètres 50.
Atelier mobile et verre synthétique coloré
Domicilié pour l’heure du côté d’Orléans, Alexis Boyer s'est doté d'un « atelier mobile », émanation d'un espace de création plus grand, afin de pouvoir travailler au plus près de chacun de ses projets. C’est donc dans ce QG nomade, garé sur le domaine de Cheverny, qu’il a œuvré « non-stop » durant 30 jours. Une première performance d’envergure, « pour laquelle de nombreux amis sont venus m’aider, car nos journées de travail duraient souvent près de 20 heures ». Sa matière première pour les pétales de ses coquelicots ? « Un verre synthétique, proche du plexiglas, mais dont la recette – que je garde secrète – permet d’obtenir un aspect mat, satiné, coloré, tout en préservant de la transparence et un effet déperlant », explique l’artiste. À cela s’ajoute des tiges en aluminium, à la fois souples et résistantes. Le résultat est bluffant. Les visiteurs sont conquis. Tout comme le marquis et la marquise de Vibraye, toujours partants pour moderniser et dynamiser l’image de leur château de famille, dont ils fêteront les 400 ans en septembre 2024.
Canal et cyprès chauves
Château privé, habité par ses propriétaires, Cheverny se visite toute l’année. Parmi ses curiosités à ne pas manquer, outre les coquelicots estivaux : les jardins, dont un verger à la française qui s’étend sur un hectare, le chenil qui abrite une centaine de chiens français tricolores, et la partie forestière d’une centaine d’hectares qui se découvre à bord d’un bateau électrique qui sillonne le canal du domaine. Un canal peuplé de cyprès chauves, dont les pieds s’épanouissent dans l’eau, comme dans leur Louisiane natale. Enfin, le château de Cheverny – sans ses deux ailes -, c’est aussi le Moulinsart d’Hergé. Une exposition permanente, riche en intrigues à dénouer et scénographies très réalistes, permet de se replonger dans toutes les aventures de Tintin. Des jurons de Haddock aux bijoux de la Castafiore, en passant par le sous-marin en forme de requin du Trésor de Rackham Le Rouge, l’immersion est immédiate. Et le charme indémodable des grands classiques, intact.
Le château de Cheverny, c'est aussi ICI