« Comme un arbre dans la ville / Je suis né dans le béton... » On pourrait résumer ainsi l’acte de naissance du nouveau siège de l’Office National des Forêts (ONF) à Maisons-Alfort. Mais rien à voir avec le message de la chanson de Maxime Le Forestier de 1972, plutôt critique face à une nature bouffée par la cité. Là, c’est tout l’inverse. Bois et forêts s’invitent en ville. C’était d’ailleurs une demande de l’ONF dans son cahier des charges : imaginer un bâtiment à partir du bois de ses propres forêts… Toute une logique, toute une esthétique et du bon sens pour penser et raisonner « durable ». C’est le projet mené en commun par l’agence Vincent Lavergne Architecture Urbanisme (VLAU) et l’Atelier WOA qui a été retenu. Ce qui a séduit le jury ? Un concept aux antipodes de la tour en béton dans lequel siègeait alors l’ONF. Le bâtiment flambant neuf de Maisons-Alfort, c’est du 100% bois français et du 100% circuit court, avec des charpentes, ossatures et 3 450 m2 de planchers provenant des forêts domaniales gérées par l’ONF. C’est de l’osé et de l’engagé. « À l’image d’un arbre, un axe vertical développe une série de plateaux qui rayonnent autour de lui. La structure composée de poutres-treillis s’y rattache comme des branches à un tronc, pour limiter les points porteurs et générer de grands espaces ouverts », explique Vincent Lavergne tout en servant de guide dans le bâtiment écoresponsable. Alors pas de béton du tout ? « Si, mais juste pour la colonne vertébrale de l’édifice et ses fondations. »
L’architecture s’efface au profit de la nature
L’autre effet bluffant du nouveau siège de l’ONF : son immersion dans le parc de l’école vétérinaire voisine. Les 7 500 m2 du bâtiment se fondent et se confondent avec la nature environnante. Mieux : assis sur un banc du parc, on ne voit plus le bâtiment. L’architecture se fait invisible. Elle s’efface au profit de la nature. Quant à la vie quotidienne des 350 salariés de l’ONF, elle oscille entre des « bureaux formels » côté ville, des espaces dédiés aux « pratiques collaboratives » dans l’« aile jardin », de vastes coursives et deux cafeterias. Le tout réparti sur quatre étages. Fluidité de circulation, points de vue sur le parc et luminosité – « le bâtiment épouse la route du soleil et les stores s’ouvrent ou se ferment selon la météo » - complètent le tableau. Au rez-de-chaussée, même la « rue intérieure » évoque un passage forestier, avec une omniprésence du bois. Et ce du sol jusqu’au plafond : du bureau d’accueil, sculpté dans un arbre, jusqu’aux suspensions d’échantillons de toutes les essences présentes dans les forêts françaises gérées par l’ONF.
« Stop au tout béton »
Le nouveau siège de l’ONF a nécessité deux ans de travaux. Deux années qui ont permis aux agences d’architecture VLAU et WOA de travailler ensemble. La première s’appuyant sur des urbanistes, sociologues, spécialistes des sciences politiques… La seconde œuvrant avec des charpentiers. Deux approches et deux regards qui se complètent face à l’adaptation de la ville aux transitions écologiques et sociales. À ce titre, Vincent Lavergne dit « stop au tout béton » et parle de « systèmes constructifs ». En fin de visite, l’architecte pousse la porte vitrée qui mène sur le toit-terrasse de l’édifice de Maisons-Alfort, inspiré par la proue d’un bateau. La vue est époustouflante. Elle porte jusqu’au tours Duo, signées Jean Nouvel et sorties de terre en 2021, dans le 13e arrondissement de Paris. Deux gratte-ciel imaginés pour être vus de loin. Une logique opposée à la réflexion de Vincent Lavergne sur « l’expérience immersive » au cœur du « bois-matière » et d’un petit bois de quartier. Question de générations ?