Il prend le temps de poser son sac, ses dossiers, de préparer un café. Rien ne presse. Le stress, on le laisse à l’extérieur. Il n’a pas sa place dans cet intérieur : un showroom aux airs de maison de campagne en plein 7e arrondissement de Paris, entre Bon Marché et Saint-François-Xavier. Christophe Delcourt reçoit, installe, s’installe. Il ne regarde pas l’heure. Au fil de la conversation, parler, échanger, confronter sont autant d’occasions, pour lui, de prendre du recul sur son métier de designer et éditeur de pièces de mobilier, mais aussi sur son parcours. « J’ai toujours dessiné », confie-t-il. Sur les conseils de sa grand-mère, il va persévérer, aller au-delà des coloriages d’écolier. Alors que, gamin, « je voulais être berger ». Il a même décroché « un diplôme agricole », comme il dit, « pour travailler dans la nature ».
Le bois obéit…
C’est par la matière, puis la fabrication, que le dessin va réapparaître dans son quotidien. La matière, la première, c’est le bois : « La base », pour Christophe Delcourt. « Une matière de construction », ajoute le designer qui appréhende le meuble comme une architecture. Et la fabrication ? « J’ai appris tous les trucs et astuces de l’ébénisterie avec un menuisier, un ferronnier… », se souvient-il. C’était à Nice, au milieu des années 1990. Ça fait un bail. De cette époque, il a gardé cet esprit d’artisan, de savoir-faire qui se transmet et s’adapte aux nouvelles contraintes, nouvelles attentes, nouveaux comportements, nouveaux modes de vie. Et le bois est parfait pour ça, « car on peut le travailler de toutes les façons, aller du léger et aérien jusqu’à l’imposant. C’est un matériau d’une grande souplesse, que l’on peut pousser loin ». Lui, il lui fait épouser les formes épurées, arrondies, courbées, parfois délicatement décalées, de ses créations. Le bois obéit. Un bois auquel Christophe Delcourt offre une apparence la plus naturelle possible, même après un surfaçage, un laquage, un mariage avec un bronze ou une céramique. A l’instar de sa nouvelle table d’appoint, qui associe épicéa brossé et lave émaillée. « Donner cette impression de bois brut, c’est montrer une forme de naturalité », explique-il. Une nature qu’il respecte depuis toujours. Dès ses premières pièces, il a été sensible à la provenance des matériaux, aux circuits raccourcis, aux conditions de travail des artisans et aux produits utilisés. « On évite le plastique. » Mieux encore : « On fabrique nos propres pièces d’assemblage en métal et en bois. » Le tout dans des ateliers situés en France.
« Je n’aime pas le meuble dont on se lasse »
Sa dernière collection « Give me shelter » - la bien nommée à l’heure du grand bal masqué… -, il l’a présentée durant Paris Design Week, qui vient de se terminer. Pour la voir, il suffit désormais de prendre rendez-vous, puis sonner à l’entrée d’une voie privée, délicieusement champêtre, où il a showroom et bureaux. Là, on découvre les nouvelles pièces de Delcourt Collection : canapés, guéridons, consoles, assises, puis cette drôle de table « ronde-ovale » ou cette « chaise de compagnie » pensée pour être baladée partout dans la maison… Il faut pousser la visite jusqu’aux créations de Collection Particulière, qui s’ouvrent à d’autres designers, sans oublier les tissus conçus tels des parures sur mesure. « Je n’aime pas le meuble dont on se lasse », conclut Christophe Delcourt. Avec lui, « un produit ne chasse pas l’autre ». Au contraire : les créations dialoguent entre elles. « Je travaille sur l’intemporel et chaque nouvelle collection complète le catalogue. » Un catalogue, dont la couverture du dernier volume n’a ni titre, ni texte, ni nom, juste une photo de forêt. La nature à l’état pur.
Delcourt Collection : 47 rue de Babylone, Paris 7e. Tél : 01 42 71 34 84 / Et aussi ICI.