L’image a eu soixante-dix ans pendant le confinement. Sept décennies nous séparent désormais du Baiser de l’Hôtel de Ville, immortalisé par Robert Doisneau. Le photographe Mohamed Khalil a eu l’idée de retourner sur les lieux, pour faire le parallèle entre la vue d’hier et celle d’aujourd’hui. Sa vidéo, très courte, en dit long. Sur la vie, la ville, sur nous aussi. Alors, certes, Doisneau avait payé un duo de comédiens, chopés à la sortie du cours Simon, pour poser, être et paraître heureux. Khalil, lui, a fait avec les passants du moment. Et la seule qui a surgi, devant lui, c’était au pas de course, masquée, en jogging, baskets, écouteurs dans les oreilles. Une silhouette aux antipodes de celles choisies par Doisneau en 1950, pour répondre à la commande d’un sujet sur « le Paris des amoureux », dans les colonnes du magazine Life. Hier, Doisneau mettait en scène le bonheur. Aujourd’hui, Khalil illustre l’ultra moderne solitude, par temps de déconfinement et de déconfiture pour Notre-Dame, dont le sort est désormais lié à celui d’une grue géante. Il s’est passé soixante-dix ans.