Confessions de confinés # 4

Ils sont écrivains, musiciens, designers ou photographes. Ces « enfermés bien inspirés » parlent de leur confinement. Confessions en 3 questions, illustrées en 1 image.

 

Nesles, auteur, compositeur, interprète : « Heureusement, est venue la lecture du superbe Gainsbook »

 

Toujours inspiré par temps de confinement ?

J’ai un rapport à la lecture, l’écriture et la musique totalement obsessionnel, ininterrompu, toujours en flux tendu. A ce niveau le confinement n’a donc pas changé grand-chose, je continue.

En revanche, passé les premiers temps de sidération, j’ai fait un rejet extrêmement violent de la chanson. Je ne pouvais écouter que des choses instrumentales. D’un coup, tout ce petit monde de la chanson en temps de confinement, j’ai trouvé ça obscène, ridicule, boursouflé de vanité, laid, totalement vain et insignifiant... Ça m’a miné, collé la nausée. Je peux comprendre cette peur du vide, ces élans nobles ou moins nobles (désir de se sentir utile, besoin de nourrir un ego affamé, tentations d’occuper le terrain vaille que vaille...), je me suis moi-même posé beaucoup de questions. Mais j’ai eu besoin de temps pour prendre un recul que je n’avais pas forcément.

Et puis, heureusement, est venue la lecture, entre autre, du superbe Gainsbook. Et ça a grandement contribué à m’apaiser, à me réconcilier avec la forme « chanson ». Ça a été un bain de jouvence, un vrai retour aux sources. Parce que là on vise haut et fort, et que s’il y a de l’arrogance, il y a aussi tellement de génie, d’humilité, d’exigence, de vérité, de travail et de panache. Putain le panache...

Grâce à Gainsbourg et ce bouquin, je pouvais à nouveau aimer la chanson dans ce qu’elle a de beau, de salvateur, de simple et de parfois brillant.

La dernière image postée sur les réseaux dits « sociaux » ?

Une photo annonçant le dernier concert que je devais donner à la Manufacture, à Paris, où j’étais en résidence pour préparer la sortie de mon prochain album prévue à l’automne. On y croyait et puis comme pour tout le monde, ça a volé en éclats. A ce moment-là tant d’informations contradictoires et aberrantes circulaient que j’oscillais encore entre colère, déni, révolte et raison. Puis ça s’est calmé. Et j’ai fini par accepter.

La priorité, une fois déconfiné ?

Serrer fort et longtemps la femme que j’aime dans mes bras. Faire un peu n’importe quoi, être enfin déraisonnable, je ne sais pas... Fumer ? - je n’ai jamais eu autant envie de m’y remettre après 15 ans d’abstinence. Retrouver ce bonheur d’arpenter Paris en tous sens, de flâner, de m’enivrer aux terrasses, de parler de tout et de rien en compagnie choisie, de lire en marchant (c’est comme ça que je préfère lire), de (re)découvrir telle rue, telle librairie, telle place, telle médiathèque, telle vieille salle de ciné, telle salle, tel café... Vivre en somme. La suite viendra bien assez vite...