Episode 5 de la « correspondance » entre 1 Epok formidable et Corridor Eléphant. C’est quoi déjà « l’Eléphant » ? Une maison d’édition et une revue (Niepcebook), qui font la part belle à « la photographie émergente ». Entre eux et nous, c’est une « correspondance » de vues et de points de vue. Avec des choix engagés et engageants. D’ailleurs pour ce 5e épisode, l’équipe d’1 Epok a choisi un trio de livres – chaque exemplaire est numéroté et signé par son auteur - que Corridor Eléphant vient de publier : il paraît que l’été, on ne part jamais en vacances sans quelques bouquins…
Le bal de la Baltique
Premier ouvrage recommandé par 1 Epok : Dans les filets de la Baltique, recueil de photos noir et blanc signées Maryse Dardaillon. Attirée par cette mer méconnue, la photographe a posé ses bagages quelque part au milieu des 500 kilomètres de côtes polonaises que longe la Baltique. Là, elle s’est laissée guider par le vent, la houle, le ressac, les nuages, les saisons… autant d’éléments qui rythment la vie des marins, la sortie des bateaux de pêche, l’éveil des criées et autres échoppes sur les ports, dont certains se résument à un ponton délabré en amorce d’une plage. C’est tout ça que racontent les images de Maryse Dardaillon. Des images qui témoignent de la rudesse du quotidien de ces hommes et de ces femmes qui vivent face à la Baltique, mais aussi grâce à elle.
Le jeu du double « je »
Métis, d’Alexis Duclos, est une curiosité. Galerie de 42 portraits, en noir et blanc, ce livre a pour objectif de pointer « l’absurdité des frontières », comme dit son auteur. Parce que les mélanges ne font que renforcer une personnalité. Parce que la multiplicité des cultures est une véritable richesse. C’est vrai. Même si, aujourd’hui encore, l’actualité nous prouve qu’une couleur de peau peut être discriminante… Il n’en demeure pas moins qu’avec Métis, Alexis Duclos fait passer un message plutôt optimiste. Son livre relève d’une dynamique. Il a choisi de photographier des journalistes, comédiens, politiques… en leur posant, à tous, cette question : « Votre existence est le fruit de métissages : comment le vivez-vous ? » Ils ont donc été 42 à se prêter au jeu de ce double « je ». A l’instar de la créatrice de mode Barbara Bui, l’ancienne ministre Christiane Taubira, la comédienne Sonie Rolland, l’écrivaine Marie Ndiaye ou encore le photographe Jean-Marie Périer, le journaliste de France Info Bertrand Dicale, le comédien Patrick Bouchitey… Chacun pose et propose sa vision du métissage. Comme avec le livre précédent, de Maryse Dardaillon, on reste dans « l’humain », « l’humanité ». Une thématique récurrente dans les publications de Corridor Eléphant et on ne va pas s’en plaindre.
Ruralité oubliée
Enfin, le livre Un dernier hiver d’Alain Roux est sans doute le plus troublant. Le plus saisissant. Car l’auteur est un ancien médecin. Aujourd’hui photographe, son parti pris a été, pour cet ouvrage, de poser son regard sur les habitants vieillissants de ces campagnes françaises où l’écran plat n’est pas, la connexion Internet relève du miracle et les réseaux sociaux ressemblent plutôt à un coup de rouge sur une toile cirée à l’heure de l’apéro. Alain Roux parle de « photographie de proximité », une sorte d’écho à l’image du médecin au chevet de son patient. Il prend le pouls de ces zones rurales oubliées, à grand renfort d’images de détails qui vont des poulets pendus dans une cuisine aux vêtements suspendus, distendus, limés, déchirés, mais que l’on porte encore pour nourrir des agneaux ou tuer un cochon. Un dernier hiver fait partie de ces livres que l’on aimerait offrir à certains politiques ou à quelques bobos qui jouent les babas d’autrefois, le temps d’un séjour dans une finca « déco » à Minorque.
Ces trois livres sont en vente sur le site de Corridor Eléphant : www.corridorelephant.com