« A 4 ans, je pouvais manger un camembert à moi toute seule », dit-elle avant d’éclater de rire dans un bistrot proche du marché des Enfants Rouges, à Paris. Et ce n’est pas tout : « quand j’allais au restaurant avec mes parents, alors que je ne maîtrisais pas encore l’alphabet, il fallait me lire toute la carte, car je ne voulais pas du menu enfant ». Elle est comme ça Margot Goepfert : gourmande, impatiente, curieuse, fonceuse. Son bac littéraire en poche, elle est tentée par le journalisme « pour faire de la critique gastronomique ». Un métier qu’elle ne conçoit pas sans comprendre ce qui se passe sous un couvercle, dans une casserole, au fond d’une poêle. Alors elle intègre le lycée des métiers de l'hôtellerie Jean-Drouant, dans le 17ème arrondissement de la capitale : « c’était l’école hôtelière de Paris, sinon rien ! »
Elle croise la route de journalistes, tous « ouf de bouffe » comme elle
Un BTS plus tard, auquel s’ajoute une année à l’université d’Angers, dans une Licence « pro » consacrée aux arts culinaires et arts de la table, elle revient à Paris. Là, elle croise la route de quelques blogueurs et journalistes, tous « ouf de bouffe » comme elle. Mais, à sa grande surprise, « la plupart travaillent, écrivent, publient ou mettent en ligne pour… rien ». Le job nourrit, mais ne fait pas vivre. Pas grave. Cela ne l’empêche pas de frapper à la porte de Denis Courtiade, le directeur de salle du restaurant Alain Ducasse au Plaza Athénée, comme ça « juste pour parler, échanger avec lui ». Et avoir un regard de « pro » sur une profession que d’aucuns infiltrent désormais en sortant de grandes écoles de commerce… ce qui manque parfois de poésie, spontanéité, fantaisie, passion. Mais pas de quoi dégoûter l’étudiante. A 21 ans, elle a envie d’en savoir plus sur le vin -« en septembre, j’irai faire les vendanges »- et se voit -« pourquoi pas »- à la tête d’un resto, « même si je suis assez hermétique à la hiérarchie en cuisine ». Un brin électron libre, elle parle finalement assez peu d’avenir : typique à son âge -« je n’ai pas encore bouclé mon mémoire de Licence »; typique aussi dans une époque -formidable ?- où plus grand chose ne fait rêver. « La seule chose que je sais, conclut-elle, c’est que je ne pourrai pas partir à la retraite à 37 ans comme ma grand-mère, institutrice ».