J’y étais…

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… au vernissage de l’expo de Gail Albert Halaban à la galerie Esther Woerdehoff, à Paris. Le travail de cette photographe américaine sur le thème du vis à vis a fait couler beaucoup d’encre. Ça a dégouliné même. Mes confrères ont aimé. Moi, moins. Parce que derrière la bonne idée d’immortaliser des Parisiens, voisins d’immeuble, se cache un banal jeu de copié-collé… Naïve, j’ai cru un instant que l'artiste avait demandé aux habitants sollicités de prendre une pose au même moment face à leur fenêtre. Et elle, installée dans l'immeuble d’en face, déclenchait alors son appareil. Une sorte de remake de Fenêtre sur cour, sans James Stewart. « Tu rêves, m’a dit un ami photographe. L’image n’est qu’un montage ». Merci l’ordi ! Quelle déception. Moi qui pensais que tout l’intérêt de l’exercice était de figer cet instant unique, où tout le monde agit, s’agite au même moment dans sa cuisine, sa chambre ou son salon. En réalité, rien n’est spontané dans l’approche de Gail Albert Halaban. A l’image de la société dans laquelle nous vivons désormais ? Où tout est aseptisé, sous vide, déjà emballé, prêt à consommer. Est-ce le message du travail de cette artiste ? Pas si sûr… En marge de cet accrochage, reste le vernissage. Sous un éclairage blafard, des gobelets en plastique, des têtes d’enterrement et un drôle de type avec perruque peroxydée sur la tête, lunettes noires et caméra en carton, faisait mine de filmer les visiteurs. Comme un voyeur. Un mateur... amateur ? Non, apparemment il est connu. « On le voit partout », m’a confié un sculpteur qui s’est risqué à mettre sa tête tout près de l’objectif de la caméra factice du vrai-faux Warhol. Tout ça se voulait drôle, mais c’était sinistre. Rien ne donnait envie de s’attarder, papoter, picoler… Quant à celles et ceux qui se sont reconnus sur les clichés exposés, d’aucuns ont osé demander s’ils avaient droit au tirage d’une image. Une sorte de « service après vente » pour « service rendu ». « Ben, non, ce n’est pas prévu ». Et un bouquin, au moins ? Car le travail de Gail Albert Halaban est consigné dans le livre Vis à vis (éditions de La Maritnière). « Oui, nous le vendons 55 euros ». Epoque formid’. Les mêmes qui prônent le covoiturage, la coloc’, le jardin partagé et le bureau à plusieurs, oublient tout dès qu’on parle sou.