Il existe différentes manies et manières d’appréhender Manhattan. Comme Alan Parker, en faisant danser une bande de jeunes talents dans Fame. Comme Woody Allen, en lâchant Diane Keaton en liberté dans les rues. Comme Brian de Palma, en adaptant Le Bûcher des vanités au cinéma. Ou comme Steve McQueen avec Shame, actuellement sur les écrans. Tour à tour, le 7e art nous présente Manhattan l’humanisée, la sublimée, la friquée, la flippée. La dernière vision est, bien sûr, la pire. La plus effrayante. Car elle montre et démontre à quel point cette île pas comme les autres peut isoler, tourmenter, désaxer certains de ses habitants. Faute de repère autre que le Madison Square Garden, le temps d’un jogging de nuit, elle peut aussi rendre accro à tout : au sexe, à la coke et même au métro. Métro où tout est possible : drague, drogue, suicide, rafle de police… Ce sous-sol crasseux symbolise d’ailleurs la descente aux enfers de Brandon, personnage principal de Shame, joué par Michael Fassbender, parfait en métrosexuel, addict au sexe jusqu’à en faire une overdose dans la backroom sordide d’une boîte gay. Le tout sur fond de Bach, interprété par Glenn Gould. On sort de là lessivé, rincé, vidé. Aussi épuisé que Fassbender, sans doute, après la performance physique qu’il a dû déployer pour ce film, interdit aux moins de 12 ans dans notre époque si formidable.