Panique en cuisine. C’était hier, du côté du carrefour de l’Odéon, à Paris. Un chef était au bord de la crise de nerf à cause d’un blogueur qui, le matin même, avait dégommé son resto en quelques mots. Un orage plus tard, un copain m’envoie le texto qui tue : il annule notre café, « parce qu’il pleut ». Pourtant ce n’était pas une pluie acide qui tombait sur la capitale. Juste quelques gouttes. Rien de plus. A croire que le Parisien de 2011 a peur. Peur de tout. De la critique. Du regard des autres. De l’eau. De se jeter à l’eau… Or, dès que l’on pose, dépose, propose, on s’expose. Du coup, certains artistes, auteurs, créateurs n’osent plus ouvrir leurs tiroirs et gardent, bien à l’abri, leur travail le plus personnel. Souvent le plus intéressant aussi. J’ai même vu des poèmes enfermés à double tour. Pourquoi ? On ne sait pas. D’aucuns avancent qu’un « vrai pro » fait d’abord « protéger » son travail. Il sort couvert, en quelque sorte. Il enregistre chacun des ses projets à l’Inpi. Au cas où. « Car nous sommes cernés de voleurs d’idées », me répond-on. Le syndrome du « copie-pas-sur-moi » à l’école. La grande parano. La même qui plane sur Levallois, désormais truffée de caméras. Souriez, vous êtes filmé, même à la terrasse d’un bistrot, à la sortie du métro… En 1983, Louis Chédid chantait Le Chacha de l’insécurité, « le chachacha de la panique organisée / chacha morose / chacha névrose ». Il avait près de trente ans d’avance. Epoque formidable ? En tout cas, on est loin de Jim Morrison qui laissait traîner ses petits carnets sur les tables des cafés de Saint-Germain-des-Prés…