Depuis 2008, 1 Epok a pour principe d’« aller vers » les autres. Ceux que l’on connaît déjà. Ceux que l’on découvre le temps d’un café, au gré d’une conversation, au détour d’une rue... Ces rencontres animent la majorité des chroniques de ce webzine. A commencer par la série de portraits Etre(s) singulier(s). C’est dans ce même esprit qu’1 Epok amorce un échange avec Corridor Elephant. A la fois maison d’édition et revue (Niepcebook), présent sur le Net mais toujours fidèle au papier, Corridor Elephant montre et défend « la photographie émergente ». Qu’est-ce qui se cache derrière un tel parti pris ? On a posé la question à Pierre Léotard, le fondateur de « l’Eléphant ».
Tout a commencé par un mail envoyé, telle une bouteille à la mer, à la rédaction de Corridor Elephant. L’idée était d’avoir des impressions et autres regards avisés sur la série de portraits « Etre(s) singulier(s) » que l’équipe d’1 Epok était en train d’étoffer. C’était en avril 2017. Près de deux ans plus tard, alors que Corridor Elephant cherche à créer des échanges avec des revues et webzines, son fondateur, Pierre Léotard, écrit à 1 Epok. Preuve que la presse, comme l’édition, sont des métiers de l’instant, mais aussi (et avant tout, peut-être) des courses d’endurance.
Rendez-vous « sous le Train Bleu »
Un premier échange téléphonique a débouché sur un café pris dans le bistrot planqué sous le Train Bleu, gare de Lyon. Drôle d’endroit pour une rencontre. Mais les meilleures réunions ou autres conférences de rédaction n’ont-elles pas lieu à un comptoir de bar ? Les sommaires les plus pertinents ne sont-ils pas griffonnés sur une nappe en papier ?... Rendez-vous donc « sous le Train Bleu » pour faire connaissance.
« On va là où les autres ne vont pas »
« La photo est un langage. » Pierre Léotard résume ainsi l’esprit de la photographie contemporaine et de sa scène émergente. Une « émergence » derrière laquelle il met aussi bien le photographe d’agence qui développe, en parallèle, un travail plus personnel, que « celui qui fait de la photo sans jamais avoir ni publié, ni exposé ». Résultat : il peut trouver une justesse et une sensibilité dans les images prises par un homme de 76 ans, qui shoote depuis l’âge de 16 ans, en marge de toute carrière « pro », des galeries, des festivals... « Chez Corridor Elephant, nous mettons en lumière des photographes en parcours depuis longtemps, ou pas, mais absents du circuit balisé du marché de l’art. Autrement dit : on va là où les autres ne vont pas », reprend Pierre Léotard. Il parle d’« un autre rapport à la photo ». Une autre approche aussi. Car il ouvre grand les fenêtres. Loin de lui toute idée de « censure » : « Les images prises avec un smartphone sont aussi de la photo. » C’est comme ça qu’il a publié, dans sa revue Niepcebook, les images du japonais Yasuo Furue : né en 1977 à Tokyo, il a immortalisé sa ville et ses vélos avec son iPhone 4. « L’Eléphant » aime le pas de côté. 1 Epok aussi.
Amorce de complicité
Depuis 2012, Corridor Elephant a exposé en ligne quelque 1 200 photographes, sorti 10 numéros de Niepcebook, comprenant les travaux de 100 photographes, publié une trentaine de livres photographiques et une soixantaine d’ebooks. Dans les coulisses de « l’Eléphant » : des appels à participation, un comité éditorial d’une dizaine de personnes et des photographes « émergents » qui deviennent « acteurs » de leur « mise en lumière ». Quant à Pierre Léotard, s’il est à la manœuvre, il se montre peu, voire pas du tout. Si d’aucuns lui disent de venir voir telle pépite aux Rencontres d’Arles, il passe… mais incognito. Si on le réclame dans un jury, il préfère envoyer l’un des membres du comité éditorial. Ce passionné se concentre désormais sur le « faire », « ce qui ne me donne pas vraiment le temps de me montrer ». Par un concours de circonstances, on a pu croiser sa route. Une rencontre qui débute un échange de contenus réguliers entre Corridor Elephant et 1 Epok. Ce texte et le portfolio ci-dessous - concocté par Pierre Léotard - servent d’amorce à cette complicité.