Communiquer. Le verbe est à la mode. Même si on se parle de moins en moins... Mais lorsqu’on s’aventure dans la création d’une revue, il faut… communiquer. Transmettre. Faire savoir. Dire pour séduire des communicants qui, à leur tour, vont susciter la curiosité de lecteurs, influenceurs, « tendanceurs »… Mission complexe aujourd’hui. Car il faut être dans le flux tout en sortant du flot. Avec une équipe légère, SBF - sans bureau fixe - et sans budget XXL, qui allait bien pouvoir soutenir, d’un point de vue com’, la revue 1 Epok formidable ? Pas bien folichon le défi à relever… Sauf que dans cette période de mutation de nos façons de travailler, penser, oser, quelques profils plus audacieux que d’autres prennent encore des risques. C’est le cas de Sarah Hamon. Au détour d’une conversation au Réjane, face à une salade et une Châteldon, elle a proposé d’allier ses savoir et savoir-faire aux premiers pas d’1 Epok formidable version « print ». Elle fait donc désormais partie de l’équipe d’1 Epok. Portrait d’une « partenaire particulière » :
Elle voulait être prof de lettres. Et Sarah Hamon va tout faire pour. Hypokhâgne et khâgne au lycée Edouard Herriot, à Lyon, où elle est née. « Je rêvais de Paris, de Normale Sup’ et d’une vie comme dans L’Etudiante. » Sauf que lorsqu’elle présente le concours d’entrée dans la grande école, la section qu’elle vise - lettres et anglais - quitte Fontenay-aux-Roses pour être délocalisée à… Lyon. Elle va alors se préparer mollement aux épreuves, les rater et finir par s’inscrire en master de lettres modernes à Lyon III. « Cette année-là, se souvient-elle, je n’ai fait que du vieux français. » Le reste du programme, c’était sa khâgne. Avec un fiancé installé à Paris, elle organise son arrivée à la Sorbonne l’année suivante, pour poursuivre son cursus en vue de tenter l’Agrégation. Ça y est ! Elle va enfin vivre comme Sophie Marceau dans le film de Claude Pinoteau ! « Sauf qu’en année de pré-concours, personne ne se parle, c’est chacun pour soi, bref c’était l’horreur ! » A cela s’ajoute des cours d’anglais donnés à des élèves de BTS « qui étaient plus âgés que moi ». « J’ai toujours travaillé, confie-t-elle. A Lyon, en marge de mes cours, j’étais vendeuse dans une boutique de vêtements : c’est comme ça que je me payais mes billets de TGV pour Paris. »
Sorbonne , Shakespeare, Sommet du luxe et Designer’s Days
Sa chance ? Une de ses profs en Sorbonne s’intéresse à son cas : « Vous aimez parler aux autres, mais personne ne vient à vous. Vous n’êtes pas épanouie dans un contexte de concours… Vous devriez faire de la com’.» Et ce d’autant que son mémoire de master, jugé « peu académique », a un lien avec la presse : « La critique de théâtre à l’époque où les pièces de Shakespeare commencent à être jouées en France. » Sarah Hamon se retourne vers le Celsa, l’école de communication de la Sorbonne, qui la refuse, faute de stages en com’. Mais il en faut plus à la jeune mariée pour baisser les bras. En 2002, elle suit un master communication événementielle au sein d’une école de la Chambre de commerce de Paris, qui alterne six mois de cours et six mois de stage. L’occasion de se frotter à l’entreprise, autrement qu’en vendant des vêtements, et d’adhérer aux critères de recrutement du Celsa. Ecole sur les bancs de laquelle Sarah Hamon n’ira finalement jamais : stagiaire dans un cabinet de conseil, elle y est embauchée dans la foulée. Sa mission : proposer à des sénateurs de participer à des débats, livrés clé en main, sur des thématiques de société. Puis le cabinet de conseil lui confie la com’ du Sommet du luxe et de la création, ainsi que la gestion des talents qui candidatent aux différents prix liés à cet événement. Sarah Hamon découvre alors l’univers du design. Elle y est sensible. Si bien qu’en 2006, elle intègre l’agence de design Aesthète, où elle chapeaute la com’ et l’événementiel, « pour comprendre comment on crée un produit de A à Z ». Un an plus tard, elle donne « un coup de main » à Alain Lardet, co-fondateur des Designer’s Days, « avec lequel j’avais déjà collaboré dans le cadre du Sommet du luxe ». C’est le déclic. Communication, création, design, événementiel sont les repères au milieu desquels Sarah Hamon a envie de creuser son sillon. Alain Lardet le sent, le sait et l’embarque à temps plein dans l’aventure des Designer’s Days.
Paris, Charlie, Miami et la mer
Défricher, découvrir, rencontrer, échanger, partager : c’est désormais le quotidien de Sarah Hamon. En 2009, elle a le choix entre s’emparer de la com’ de la maison Baccarat ou monter sa propre boîte. La sécurité la tente, mais la liberté la séduit davantage encore. Elle n’a pas 30 ans quand elle crée S2H : « S et H, ce sont mes initiales. Le 2, c’est parce qu’il y a un h dans mon prénom et un second dans mon nom. » En solo à ses débuts, aujourd’hui son agence, ciblée sur le design, l’architecture et l’art de vivre, compte une douzaine de salariés à Paris et bientôt cinq personnes à Miami. Pourquoi la Floride ? « Parce que j’y vis depuis 2015. » Ce qui a précipité son départ : « L’attentat contre Charlie Hebdo. Avec mon mari, mes deux enfants, nous ne voulions plus rester en France… » Mais bouger où ? La Floride ne s’est pas imposée tout de suite. Il y a d’abord eu des vacances, pour tester. Puis cela a été une évidence : la météo, la plage, « la vie de province » comme dit Sarah Hamon. « De mon bureau, perché au 25e étage d’une tour, je vois la mer et l’horizon. » Un choix de vie hors des sentiers battus qui ne doit pas rebuter ses clients. Au contraire. Il faut y voir une ouverture d’esprit et une approche différente des distances, des autres, de l’ailleurs. Bientôt un troisième bureau à Los Angeles ? Sarah Hamon y songe. « Je pense que ma mère ne comprend pas en quoi consiste mon métier, conclut-elle en souriant. Et quand j’explique mon travail à mes enfants, je leur dis que je fais en sorte qu’il y ait de belles images dans les magazines. »