Quand Rodolphe Burger s’installe dans la salle Henri Langlois de la Cinémathèque, ce n’est pas en tant que spectateur. Mais comme musicien. Le leader de l’ex-groupe Kat Onoma a séché le Real-PSG et fêté à sa façon la Saint-Valentin : il a grimpé sur la scène avec sa guitare et ses claviers, pour poser sa musique sur le court métrage Lon Chaney se maquille et le film L’Inconnu de Tod Browning. Ces deux muets ont ainsi ouvert la rétrospective que la Cinémathèque consacre à Browning jusqu’au 4 mars. Qui est Browning ? Un réalisateur américain disparu en 1962, que d’aucuns ont qualifié de « cinéaste de l'étrange et de la marginalité ». Normal : on lui doit notamment Freaks ou « la monstrueuse parade », sorti sur les écrans en 1932.
Lanceur de couteaux, guitare et Malabar
Burger était inspiré. Il faut dire que l’histoire de L’Inconnu a de quoi stimulé l’imagination : pour échapper à la police, Alonzo (inquiétant Lon Chaney) trouve refuge dans un cirque. Le criminel devient lanceur de couteaux avec ses pieds, car il fait croire qu’il n’a pas de bras… Immersion immédiate dans le bizarre, la peur, le mensonge, la manipulation, la folie aussi, autant de thèmes chers à Browning. Et l’intrigue se corse lorsque Nanon (fascinante Joan Crawford), la fille du directeur du cirque, entre en piste… La guitare de Burger a ainsi rythmé un étonnant numéro, où « la » Crawford fouette un duo de chevaux sur le point de démembrer un drôle de monsieur muscles, baptisé Malabar.
Concert privé, Cheval Mouvement et 35 mm
La salle Henri Langlois était pleine. Malgré ça, l’accompagnement de Burger avait des airs de concert privé, pour des amis, des fans du Kat Onoma d’autrefois. Celui de La Chambre, du Cheval Mouvement et de la reprise plus que parfaite du Radioactivity du groupe allemand Kraftwerk. Et dire que cette soirée aurait pu ne jamais exister : la boîte qui renfermait le film en 35 mm de Tod Browning est longtemps restée fermée, quasi abandonnée, personne ne s’en souciait. Car, dessus, était inscrit… L’Inconnu.