Gamin, il voulait être chirurgien. Finalement, il va bien utiliser du fil et une aiguille, mais pour créer des vêtements. Tailleur rue d’Aboukir, à Paris, Laurent Touboul habille le gratin parisien. A commencer par le nouveau président de la République. Parole donnée à celui qui « rend beaux » les politiques.
1 Epok : Jonas & Cie existe depuis quand ?
Laurent Touboul : Pendant vingt ans, nous étions au 17 de la rue d’Aboukir. Depuis vingt ans, nous sommes au numéro 19.
1 Epok : Comment les politiques sont-ils venus à vous ?
Laurent Touboul : Mon père faisait du sport avec Jean-Pierre Elkabbach. Le journaliste est venu nous voir. Il a apprécié le rapport qualité-prix que nous proposons. Puis il a commencé à nous adresser des personnalités politiques, comme Hubert Védrine ou Christian Poncelet. C’était au début des années 2000.
1 Epok : Qu’est-ce qui leur plaît chez vous, au-delà du bon rapport qualité-prix ?
Laurent Touboul : On les conseille au mieux. On les rend beaux. On leur fait plaisir.
1 Epok : Viennent-ils essayer ici, dans votre atelier, ou allez-vous chez eux ?
Laurent Touboul : Les deux. Parfois ils ont peu de temps, alors je me déplace.
1 Epok : Comment avez-vous croisé la route d’Emmanuel Macron ?
Laurent Touboul : Justement, avec lui, je me suis déplacé. C’était en mai 2015 : je suis allé le voir à Bercy, un matin de bonne heure. Son bras droit, Ismaël Emelien, m’avait appelé en m’expliquant que son boss voulait renouveler sa garde-robe.
1 Epok : Qu’achète-t-il chez vous ?
Laurent Touboul : Ses costumes et ses manteaux.
1 Epok : C’est le premier président de la République que vous avez dans votre clientèle ?
Laurent Touboul : Oui.
1 Epok : Comment l’appelez-vous ?
Laurent Touboul : Monsieur. Je suis son tailleur, pas son pote.
1 Epok : Et lui, comment vous appelle-t-il ?
Laurent Touboul : Monsieur. En revanche, nous nous appelons par nos prénoms avec sa femme, Brigitte. Comme j’ai les mensurations du président, c’est elle qui passe commande désormais.
1 Epok : Est-il déjà venu vous voir, rue d’Aboukir ?
Laurent Touboul : Oui, une fois. Je me souviens, nous avions parlé du marché du textile, de la profession de tailleur et de l’économie en général.
1 Epok : Ça change quoi de connaître le locataire de l’Elysée ?
Laurent Touboul : Je suis ravi. Même si, en ce moment, je bosse sept jours sur sept et je ne dors plus que trois heures par nuit, car les commandes affluent de toute part. Mais je ne vais pas me plaindre.
1 Epok : Certains petits secrets des grandes institutions se disent-il dans vos cabines d’essayage ?
Laurent Touboul : Oui, je pense. J’ai le souvenir de sénateurs de bords différents qui se sont parlés pendant un essayage.
1 Epok : Portez-vous des costumes Jonas & Cie ?
Laurent Touboul : Oui, bien sûr. Je ne sais pas vendre ce que je n’aime pas.