Quelques Parisiens m’avaient prévenue : « tu verras, en province, on ne marche pas de la même façon qu’à Paris ». Je me demandais bien ce qu’ils voulaient dire par là. Après tout, les marchands de chaussures vendent les mêmes modèles d’une ville à l’autre. On trouve des espadrilles à Biarritz comme à Nantes et Paris. Des « tropéziennes » de la Côte d’azur au ghetto gay parisien, des ballerines partout et des mocassins chez n’importe quel pro de la godasse. Et puis, hier après-midi, j’ai compris : les chaussures n’y sont pour rien. Tout est dans la vitesse de la marche. A Paris, on se cale sur la cadence infernale des couloirs du métro des stations Châtelet, Concorde ou encore Saint Lazare. Autrement dit : on trace. On file. On cavale. Comme un marathonien. Comme s’il y avait le feu. En province, on ignore tout des bousculades sur le quai de la station Place d’Italie, de la nana qui fait rouler sa valise sur vos pieds –sans s’excuser- à Montparnasse et du type qui manque de vous faire tomber en voulant à tout prix monter dans la rame, alors que le signal de fermeture sonne depuis des plombes. S'éloigner de la capitale est donc moins un changement de vie qu'un changement de rythme de vie. Un grand luxe dans cette époque si formidable.